Malgré tout ça, la justice américaine place le secret industriel des fabricants de machines devant le contrôle démocratique d’un candidat. Plus récemment, le “Government Accountability Office”
du gouvernement américain a rendu un rapport accablant sur le vote électronique aux US, indiquant que le gouvernement est «
à tous les niveaux » incapable d’adresser les problèmes de cette technologie (rapport PDF).
La fraude étant un fait démontré et persistant (elle existait bien avant les machines et elle continuera à exister), une majorité des problèmes rencontrés aux US seraient d’ordre techniques ou dû à des erreurs d’ergonomie et de design.
Encore mieux, le principal organisme certificateur de machines à voter US est... décertifié
!
Diebold est dans la tourmente : après avoir tenté de stopper la diffusion du documentaire Hacking Democracy précité, tout en se trompant de film, sa réputation de sécurité (ils fabriquent des coffres-forts et des distributeurs de billets) en prend un grand coup : « D’abord, entrez sur un marché que vous ne comprenez pas, vendez à des clients qui n’y comprennent pas grand chose non plus. Ensuite livrez un produit sans le tester correctement. N’embauchez pas assez de gens compétents. Quand les gens commencent à détecter des problèmes, niez, cachez et ignorez tout. Enfin, blâmez vos critiques quand tout vous revient dans la figure. » voilà ce qu’écrit le vénérable magazine Fortune (ils auraient pu ajouter l’intimidation des critiques à la liste).
Il est vrai que quand il suffit d’aller récupérer la clé directement sur le site web, on peut se demander ce que sécurité veut dire chez Diebold (la preuve par l’image). Assez pour que les actionnaires prennent note et veuillent se séparer de quelques apprentis sorciers qui ternissent la réputation d’une firme vieille de 150 ans, ça sent la fin chez Diebold Elections
Systems.
En Ukraine, on a trouvé une faille encore plus facile à exploiter : il suffit de couper le courant
! Tiens, combien de bureau de vote en France ont une alimentation électrique à l’épreuve d’une coupure ?
Plus près de chez nous, chez nos voisins bataves, la fondation "nous ne faisons pas confiance aux machines à
voter" publie une série d’échanges troublants entre Jan Groenendaal, qui fournit les logiciels embarqués par Nedap dans ses machines, et le gouvernement hollandais. Je vous laisse juges de la teneur des propos, mais il est clair qu’il n’y a pas que Diebold qui commence à avoir de
sérieuses craintes pour son avenir. Pour mémoire, la fondation avait déjà montré comment pirater une machine
Nedap pendant un scrutin.
Ces démonstrations ont forcé la ville d’Amsterdam à revenir au papier en catastrophe, un mois avant des élections nationales. P.S. : ne ratez pas le rapport de l’OSCE sur le vote électronique en
Hollande.
* Chez nos voisins allemands, la pétition contre le vote électronique en Allemagne a recueilli 45 000 signatures, ce qui en fait la seconde pétition la plus large depuis l’introduction des pétitions par internet dans le pays (à noter que l’Allemagne autorise les signataires étrangers dans les pétitions).
Chez nous cette fois, Grenoble et Saint Denis ont
renoncé à utiliser des ordinateurs de vote. Charlie Hebdo de la semaine du 18 décembre 2006 a publié un dossier intitulé « Machines à voter : recette pour une fraude électorale parfaite », comme quoi la presse généraliste se réveille.
A Issy-les-Moulineaux, le très technophile André Santini impose le vote électronique, ce qui déplaît fortement à Benoît Sibaud qui maintient un
dossier sur le vote à Issy fort complet, et a récemment envoyé une lettre
ouverte à son député-maire.
Du côté des partis, Les Verts demandent un moratoire sur les machines à voter. Les jeunes UDF de Loire-Atlantique se prononcent
contre le vote électronique, la candidate UDF aux législatives Quitterie Delmas se dit absolument
contre le vote électronique. Paul Subrini
(Issy) est pour (je vous laisse juger de sa façon de ne pas aborder le sujet de la sécurité tout le mentionnant sur le thème les américains sont des idiots, pas nous). Que font les autres ?
Politis consacre un article (payant) au sujet :Machines à voter ou machines à truquer ? : « Les urnes électroniques garantissent-elles un vote fiable ? Les preuves du contraire s’accumulent, poussant des élus et des informaticiens à réclamer un moratoire. Mais le ministère de l’Intérieur fait la sourde oreille. ». Le JDN a fait un dossier sur le vote électronique en 10 technologies.
Pas directement lié aux ordinateurs de vote, mais trop mignon pour illustrer l’illusion que tout est bien sécurisé (dormez tranquilles vous disent les fabricants et les politiques), une belle démonstration qu’un ordinateur ça se programme facilement : le piratage d’un terminal carte
bancaire pour jouer à Tétris. Pour l’anecdote, et en plein dans le sujet, on se rappellera que le fameux Jan Groenendaal précité avait rejeté les accusations de piratage possible de son logiciel, alors que des hackers prétendaient
pouvoir modifier une machine Nedap pour en faire un jeu d’échec. "Je voudrais bien voir ça" a-t-il dit. Aussitôt dit, aussitôt fait grâce à...
"PowerFraud" ! On comprend mieux pourquoi certains vendeurs de machines
tentent de duper leur monde en faisant croire que leurs machines ne sont pas des ordinateurs.
Le pire, c’est que je suis sûr d’en avoir oublié plein. Si malgré tout ceci vous avez encore confiance dans le vote électronique, je crains de ne pouvoir rien pour vous. Sinon, allez signer la pétition pour le maintien du vote papier, et participez au dépouillement dans votre circonscription si vous le pouvez (je le fais, c’est une bonne expérience et un grand moment social).
- Qui controle le vote électronique
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