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Tout répressif
Quand les gendarmes traquent la drogue en classeÉducation. Indignation dans le Gers après l’intervention musclée des forces de l’ordre dans un collège de Marciac.
Source : Cabinets Avocats. com / 28 décembre 2008 « Elle n’avait jamais connu pareille violence », souffle Frédéric David. Ce père de famille n’en revient toujours pas. Mercredi 19 novembre, sa fille Zoé, quatorze ans, et ses camarades du petit collège de Marciac (Gers) ont eu droit à une descente de gendarmerie scandaleuse : en pleine classe, avec maîtres-chiens et fouilles au corps… Une opération, menée dans le cadre de la « prévention » contre l’usage de drogue, qui a tourné à l’humiliation pour beaucoup d’élèves. Un récit accablant L’affaire n’aurait jamais franchi les murs de cet établissement tranquille sans la présence d’esprit de Frédéric David. C’est en discutant tranquillement avec sa fille, le week-end suivant, que ce père divorcé découvre tout. « Je n’en revenais pas, se rappelle-t-il. Cela me paraissait tellement grave que je lui ai demandé d’écrire son témoignage sur une feuille. » Le récit de sa fille est précis. Et accablant. Les pandores ont pénétré dans la classe quelques minutes après le début des cours. « Nous allons faire entrer un chien ! Mettez vos mains sur les tables, restez droit, ne le regardez pas ! Quand il mord, ça pique ! », lance un gendarme. L’animal passe dans les rangs, renifle chaque cartable. Les élèves sont tétanisés. La prof, visiblement pas au courant, reste pétrifiée. Le chien s’arrête une première fois devant le sac d’une amie de Zoé. « Le dresseur a claqué des doigts en disant : "Sortez mademoiselle, avec toutes vos affaires !" » Le chien ne bronche pas devant Zoé. Mais les gendarmes la font sortir quand même. Dans le couloir, l’adolescente subit, comme tous les élèves suspectés, une fouille en règle. Elle doit vider son sac par terre, enlever ses chaussures, déplier ses ourlets de pantalon. « On dirait qu’elle n’a pas de hasch mais avec sa tête mieux vaut très bien vérifier ! », aurait dit un gendarme. Tout y passe… « Elle fouilla alors dans mon soutif et chercha en passant ses mains sur ma culotte ! Les gendarmes n’exprimèrent aucune surprise face à ce geste mais ce ne fut pas mon cas ! Je dis à l’intention de tous "C’est bon arrêtez, je n’ai rien !" » Finalement, Zoé ramasse ses affaires et retourne en classe. « La prof m’a demandé ce qu’ils ont fait. Je lui ai répondu qu’ils nous avaient fouillés. Je me suis assise et j’ai eu du mal à me consacrer aux maths ! » conclut la jeune fille. Frédéric David a évidemment cherché à joindre le principal du collège. « Il ne m’a jamais rappelé, assure-t-il. Aussi, j’ai décidé de publier le témoignage sur Internet. Il était impensable de ne rien faire. » D’autant que l’affaire n’a rien d’un cas isolé. Le lundi 17 novembre, seize gendarmes, dont deux maîtres-chiens, ont fait irruption de la même manière à l’école des métiers d’Auch-Pavie, toujours dans le Gers. Selon la FCPE locale, qui, avec la FSU, condamne ces agissements, pas moins de vingt-trois opérations de ce type auraient déjà été menées depuis début 2008. L’inspecteur d’académie, Jean-Marie Louvet, ne le nie pas. Et trouve la polémique « excessive ». « Comme dans tous les départements, il y a une convention entre la police, la gendarmerie, le procureur et l’éducation nationale pour lutter contre le trafic de drogue. Nous agissons pres- que toujours à la demande des proviseurs. » Tout juste concède-t-il que, dans le cas de Marciac, « la préparation en amont de l’intervention n’a pas été suffisante ». Afin de tenter de calmer l’affaire, l’Inspection académique a annoncé, vendredi dernier, qu’elle allait revoir ses procédures, notamment l’information des élèves. « Mais on ne va pas suspendre ces opérations, ajoute Jean-Marie Louvet. La loi s’applique partout. » De son côté, Frédéric David appelle à un rassemblement vendredi prochain devant le collège de Marciac. Sous ce mot d’ordre : « Oui à la prévention, non à la terrorisation. » Laurent Mouloud Descente de gendarmes à l’écolemercredi 26 novembre 2008, Source : Plume de presse Le blog "Coup de coeur"
Nous avons reçu d’un plumonaute le témoignage suivant, que nous vous livrons in extenso. "Lundi 17 novembre 2008, 10h 30, Ecole des Métiers du Gers. Descente musclée de la gendarmerie dans les classes Je fais cours quand, tout à coup, sans prévenir, font irruption dans le lieu clos de mon travail quatre gendarmes décidés, accompagnés d’un maître-chien affublé de son animal. Personne ne dit bonjour, personne ne se présente. Sans préambule, le chien est lancé à travers la classe. Les élèves sont extrêmement surpris. Je pose des questions aux intrus, demande comment une telle démarche en ce lieu est possible. On ne me répond pas, j’insiste, on me fait comprendre qu’il vaut mieux que je me taise. Les jeunes sont choqués, l’ambiance est lourde, menaçante, j’ouvre une fenêtre qu’un gendarme, sans rien dire, referme immédiatement, péremptoirement. Le chien court partout, mord le sac d’un jeune à qui l’on demande de sortir, le chien bave sur les jambes d’un autre terrorisé, sur des casquettes, sur des vêtements. La bête semble détecter un produit suspect dans une poche, et là encore on demande à l’élève de sortir. Je veux intervenir une nouvelle fois, on m’impose le silence. Des sacs sont vidés dans le couloir, on fait ouvrir les portefeuilles, des allusions d’une ironie douteuse fusent. Ces intrusions auront lieu dans plus de dix classes et dureront plus d’une heure. Une trentaine d’élèves suspects sont envoyés dans une salle pour compléter la fouille. Certains sont obligés de se déchausser et d’enlever leurs chaussettes, l’un d’eux se retrouve en caleçon. Parmi les jeunes, il y a des mineurs. Dans une classe de BTS, le chien fait voler un sac, l’élève en ressort un ordinateur endommagé, on lui dit en riant qu’il peut toujours porter plainte. Ailleurs (atelier de menuiserie-charpente), on aligne les élèves devant le tableau. Aux dires des jeunes et du prof, le maître-chien lance : « Si vous bougez, il vous bouffe une artère et vous vous retrouvez à l’hosto ! » Il y a des allées et venues incessantes dans les couloirs, une grande agitation, je vois un gendarme en poste devant les classes. J’apprendrais par la suite qu’aucun événement particulier dans l’établissement ne justifiait une telle descente. La stupeur, l’effroi ont gagné les élèves. On leur dira le lendemain, dans les jours qui suivent qu’ils dramatisent. Ils m’interrogent une fois la troupe partie, je ne sais que dire, je reste sans voix. Aucune explication de la direction pour le moins très complaisante. Je comprends comment des gens ont pu jadis se laisser rafler et conduire à l’abattoir sans réagir : l’effet surprise laisse sans voix, l’effet surprise, indispensable pour mener à bien une action efficace, scie les jambes. Ensuite, dans la journée, je m’étonne de ne lire l’indignation que sur le visage de quelques collègues. On se sent un peu seul au bout du compte. Certains ont même trouvé l’intervention normale, d’autres souhaitable. Je me dis qu’en cinquante ans (dont vingt comme prof), je n’ai jamais vu ça. Que les choses empirent ces derniers temps, que des territoires jusque là protégés subissent l’assaut d’une idéologie dure. Ce qui m’a frappé, au-delà de l’aspect légal ou illégal de la démarche, c’est l’attitude des gendarmes : impolis, désagréables, menaçants, ironiques, agressifs, méprisants, sortant d’une classe de BTS froid-climatisation en disant : « Salut les filles ! » alors que, bien sûr il n’y a que des garçons, les félicitant d’avoir bien « caché leur came et abusé leur chien ». A vrai dire des marlous, de vrais durs n’auraient pas agi autrement. C’est en France, dans une école, en 2008. Je me dis que ces gens-là, les gendarmes, devraient accompagner les gens, les soutenir, qu’ils devraient être des guides lucides et conscients. Au lieu de ça, investis d’un drôle de pouvoir, ils débarquent, on dirait des cow-boys, et terrorisent les jeunes. Un professeur qui ne manque jamais de faire contre la drogue une prévention qu’il juge intelligente." En raccrochant, un brin nauséeux, nous songions que le pire était peut-être justement que ce principal ne voyait pas en quoi il faudrait s’insurger face à ce genre de procédés. Dans les écoles de France aujourd’hui, quand la police ne vient pas arrêter des enfants ou des parents sans-papiers, ce sont les gendarmes qui se livrent à des opérations coups de poing pour traquer les jeunes consommateurs de drogues douces. Ne voit-on pas cette tendance de flicage généralisé à outrance qu’impose à notre société les néo-conservateurs de l’UMP ? Jusque dans les établissements scolaires, qui devraient rester des sanctuaires, nous semble-t-il en conscience. Mais cette conscience, que nous invoquions à l’instant, paraît dépassée au regard des pratiques en vogue en Sarkozie. Et il semble bien que la répression ne connaisse aujourd’hui plus aucune limite.
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