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« Le PS a une attitude néo-coloniale sur la diversité »Source : Rue 89 / 19/06/2007
Après la nomination au gouvernement de Rama Yade et Fadela Amara, qui rejoignent Rachida Dati, un responsable socialiste, Fayçal Douhane, élu au Bureau national du PS, dénonce l’attitude de son parti, incapable de faire élire à l’Assemblée des candidats issus de la diversité. Cet échec va compliquer la victoire aux municipales dans plusieurs grandes villes, avertit-il. Quelle est votre réaction après l’arrivée de deux secrétaires d’État issues de l’immigration ? En tant que démocrate sincère, je me réjouis de ces nominations, notamment de celle de Rama Yade, une femme de convictions. Avec trois membres du gouvernement issus de la diversité, on sort de l’exception pour entrer dans une normalité. J’aurais cependant souhaité qu’il y ait un homme car les Français issus de l’immigration sont trop souvent stigmatisés. La nouvelle Assemblée s’est un peu féminisée et rajeunie, mais pas ouverte à la diversité française. Qu’est ce qui n’a pas marché ? Je parlerai simplement de mon parti, le PS. À l’exception de l’Antillaise George Pau-Langevin, ancienne présidente du Mrap élue à Paris, aucun des 182 députés métropolitains n’est issu des minorités visibles. Les vingt candidats qui ont été présentés l’ont été soit dans des circonscriptions imprenables, des terres de mission pour la gauche, soit parachutés par l’instance nationale sans procédure démocratique. En clair, les militants n’ont pas été appelés à voter pour désigner leur candidat lorsque cette circonscription était réservée à un candidat issu de la diversité. Résultat : des candidats dissidents se sont présentés, par exemple en Charente contre Malek Boutih, ou alors ils ont perdu faute d’ancrage local. Vous proposiez une autre méthode ? Tout à fait. Il fallait appliquer la méthode mise en oeuvre dans le cadre de la parité. On désigne des circonscriptions réservées à ce type de candidats et les militants choisissent entre diverses candidatures locales. À Argenteuil, dans le Val d’Oise, la direction nationale a préféré investir Faouzi Lamdaoui, qui vient de Paris, alors qu’Ali Romdhane, ancien secrétaire de section, très implanté localement, aurait pu être désigné avec une grande chance d’emporter cette circonscription, où le député sortant UMP ne l’a emporté qu’avec six cents voix d’écarts. Pourquoi avoir désigné tel candidat plutôt que tel autre ? Je ne connais pas les critères qui ont présidé à ce choix. Bruno Le Roux, le secrétaire aux élections du PS, responsable de ce choix, a en tout cas transformé de l’or en plomb. La direction nationale a privilégié la docilité de candidats bien en vue à Solférino [le siège du PS à Paris, NDLR] au détriment de l’enracinement et du mérite. Le PS est un parti discriminant vis-à-vis de ses militants issus de la diversité. Quelles seront les conséquences de ce grave échec ? Cette attitude paternaliste et néo-coloniale où l’on choisit ses immigrés est un formidable encouragement dans le cadre des municipales à la constitution de listes citoyennes, un peu sur le modèle des listes Motivés en 2001, sur lesquelles se présentent de nombreux candidats issus de la diversité. Vu leur implantation locale, ces listes pourraient facilement obtenir entre 10 et 20%, ce qui, dans certaines villes, pourrait constituer un big bang. La politique se fait par la preuve et le PS n’a rien prouvé pour accueillir les citoyens dans toute leur diversité.
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