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RÉSEAU SOCIAL SOLIDAIRE

La peine de mort dans le monde

Source : Amnesty- International / Londres, avril 2005

Le présent document recense les événements relatifs à la peine de mort qui ont marqué l’année 2004. Cinq États ont aboli la peine capitale pour tous les crimes, portant à 84 le nombre de pays ayant totalement aboli ce châtiment à la fin de l’année.


évolution en 2004

DOCUMENT PUBLIC

Résumé

Un très grand nombre de condamnations à mort ont été commuées au Malawi et en Zambie, tandis que plusieurs autres pays ont suspendu les exécutions. Lors de sa session annuelle à Genève, la Commission des droits de l’homme des Nations unies, dans une résolution, a réitéré son appel en faveur d’un moratoire mondial sur les exécutions. Cette résolution a été soutenue par 76 pays, soit un de plus qu’en 2003. Jamais ce chiffre n’avait été aussi élevé depuis qu’une résolution analogue a été adoptée pour la première fois, en 1997. En 2004, au moins 3797 prisonniers ont été exécutés dans 25 pays et pas moins de 7395 personnes condamnées à mort dans 64 États. Des mineurs délinquants ont été exécutés en Chine et en Iran.

Parmi les autres sujets évoqués dans ce document figurent notamment certaines décisions de justice importantes, le recours à la peine de mort contre des innocents, les reprises des exécutions et les activités de campagne menées en vue de promouvoir l’abolition de ce châtiment.

Abolition de la peine de mort

Le monde a continué d’évoluer vers l’abolition universelle de la peine capitale au cours de l’année 2004. À la fin de l’année, 84 pays l’avaient abolie pour tous les crimes . Douze autres avaient restreint son application aux crimes exceptionnels tels que ceux commis en temps de guerre. Pas moins de 24 pays étaient abolitionnistes de facto : ils n’avaient procédé à aucune exécution depuis dix ans ou plus, et semblaient avoir mis en place une politique de non-application des sentences capitales ou s’étaient engagés au niveau international à ne pas appliquer de telles sentences. Soixante-seize autres pays et territoires maintenaient la peine de mort, bien que tous n’aient pas prononcé de sentences capitales et que la plupart n’aient procédé à aucune exécution au cours de l’année 2004 (voir plus loin la rubrique Condamnations à mort et exécutions). La liste des pays abolitionnistes et non abolitionnistes est régulièrement mise à jour sur le site d’Amnesty International. Vous pouvez la consulter à l’adresse suivante : http://web.amnesty.org/pages/deathp...

Bhoutan

Le 20 mars, le roi du Bhoutan a aboli la peine de mort par décret. Ce châtiment était prévu dans la législation bhoutanaise depuis la codification du Thrimzhung Chhenmo (Loi suprême), en 1953. Le souverain disposait toutefois du droit de grâce. Selon les informations transmises par les autorités de ce pays aux Nations unies en 1972, la trahison et l’assassinat étaient passibles de la peine capitale. D’après les informations recueillies par Amnesty International, les dernières condamnations à mort ont été prononcées en 1974, contre six personnes jugées pour trahison ; elles étaient accusées d’avoir comploté en vue d’assassiner le roi. Celui-ci a par la suite commué leur peine.

Grèce

En novembre, le Parlement grec a approuvé la ratification du Protocole n°13 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, abolissant ainsi la peine capitale pour tous les crimes. Ce Protocole est un traité international qui prévoit l’abolition de ce châtiment en toutes circonstances, sans aucune exception (voir plus loin la section Traités internationaux).

La Grèce avait aboli la peine de mort pour les crimes de droit commun en 1993, mais l’avait maintenue dans son Code pénal militaire pour certains crimes graves commis en temps de guerre. La dernière exécution remonte à 1972.

Samoa

Le 15 janvier, le Parlement du Samoa a adopté à une majorité écrasante une loi portant abolition de la peine de mort. Auparavant, le meurtre et la trahison étaient passibles de ce châtiment. Désormais, la peine maximale applicable dans cet État est la réclusion à perpétuité, peine que choisissait jusque-là le chef de l’État lorsqu’il commuait des sentences capitales.

Le Premier ministre du Samoa a commenté en ces termes l’adoption de cette loi : « La décision d’abolir la peine de mort a été prise dans l’intérêt du Samoa et du peuple samoan. Samoa, en bon citoyen du monde et de sa région, reconnaît le consensus mondial et régional contre la peine capitale. » Cette décision, a-t-il ajouté, montre à quel point Samoa « prend au sérieux ses obligations internationales et régionales ». Les autorités du Samoa n’ont procédé à aucune exécution depuis la proclamation de l’indépendance de cet État, en 1962. La dernière exécution a été recensée pendant les années 1950, sous l’autorité néo-zélandaise.

Sénégal

Le 10 décembre, Journée des droits de l’homme, le Parlement sénégalais a adopté à une écrasante majorité une loi abolissant la peine de mort pour tous les crimes. Le Sénégal n’avait procédé à aucune exécution depuis 1967, mais continuait à prononcer des condamnations à mort - la dernière datant de juillet 2004. Cet État est ainsi devenu le quatrième pays d’Afrique de l’Ouest - après le Cap-Vert, la Guinée-Bissau et la Côte d’Ivoire - à avoir aboli la peine de mort.

Turquie

En 2004, la Turquie a inscrit l’interdiction de la peine capitale pour tous les crimes dans sa Constitution et a supprimé ce châtiment de son Code pénal.

Le 7 mai, le Parlement turc a adopté la Loi n°5170, supprimant les dispositions de l’article 15 de la Constitution qui autorisaient le recours à la peine de mort en temps de guerre et ajoutant à l’article 38 la mention suivante : « la peine capitale [...] ne sera pas prononcée ».

Le 14 juillet, le Parlement a adopté la Loi n°5218, en vertu de laquelle la peine de mort disparaît de l’ensemble des articles du Code pénal turc et est convertie en réclusion à perpétuité.

En outre, le gouvernement turc a fait part de son intention de devenir partie aux traités abolitionnistes internationaux en signant le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Protocole n° 13 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

En 2002, la Turquie avait aboli la peine de mort sauf en temps de guerre ou de menace de guerre imminente. Les dernières exécutions recensées dans le pays ont eu lieu en 1984.

Suspension des exécutions

Kirghizistan

Le président Askar Akaïev a annoncé en janvier que le moratoire sur les exécutions instauré en 1998 serait prorogé d’une année. Au moins 130 prisonniers seraient sous le coup d’une condamnation à mort au Kirghizistan.

Tadjikistan

Le 8 juillet, le Majlisi Milli (chambre haute du Parlement) a approuvé une loi « relative à la suspension de l’application de la peine de mort ». Après avoir été signé par le Président, ce texte est entré en vigueur le 15 juillet. Il dispose qu’aucune nouvelle condamnation à mort ne doit être prononcée, et que les infractions pour lesquelles le Code pénal prévoyait jusqu’ici la peine de mort sont désormais passibles d’une peine de vingt-cinq années de réclusion. Un moratoire de facto était observé depuis le 30 avril, date à laquelle le président Imamali Rakhmonov avait annoncé, lors d’une session commune des deux chambres du Parlement tadjik, qu’un moratoire serait instauré au Tadjikistan en temps opportun. Il avait déclaré que les droits humains et la liberté constituaient des « valeurs fondamentales et inviolables », et que le droit à la vie occupait « une place toute particulière » parmi ces valeurs. « En effet, il s’agit d’un droit naturel, et nul ne peut priver quiconque d’un tel droit », avait-il ajouté.

Le 30 novembre, le Majlisi Namoyandagon (Chambre basse du Parlement) a voté un projet de loi portant modification de cinq articles du Code pénal. Ceux-ci, avant l’entrée en vigueur du moratoire, prévoyaient la peine capitale pour les infractions suivantes : « meurtre prémédité avec circonstances aggravantes », « viol avec circonstances aggravantes », « terrorisme », « génocide » et « biocide ». Le nouveau texte rendait ces infractions passibles d’une peine de réclusion à perpétuité. À la fin de l’année, il n’était pas encore entré en vigueur.

Selon les informations recueillies, quatre prisonniers - Ratchabmourod Tchoumaïev, Oumed Idiyev, Akbar Radjabov et Moukharam Fatkhoulloïev - ont été exécutés peu avant que le président ne prononce son discours, au mois d’avril. Le Comité des droits de l’homme des Nations unies, saisi en application du Premier Protocole facultatif du PIDCP, avait pourtant exhorté à plusieurs reprises les autorités tadjikes à ne pas exécuter Ratchabmourod Tchoumaïev et Oumed Idiyev tant qu’il n’avait pas examiné les communications qui lui avait été soumises en faveur de ces deux hommes.

Commutations

Malawi

Le président Bakili Muluzi a commué 79 condamnations à mort le 9 avril (date du Vendredi saint dans le calendrier chrétien). Aucune exécution n’a eu lieu au Malawi depuis 1992.

Zambie

En février, le président Levy Mwanawasa a commué la peine de 44 soldats condamnés à mort pour leur implication dans une tentative de coup d’État en 1997. Il a déclaré : « Tant que je serai président, je ne signerai aucun ordre d’exécution. »

Au mois de mai, le président Mwanawasa a gracié 15 prisonniers condamnés à mort pour meurtre et vol aggravé. D’après Jack Kalala, l’attaché de presse du chef de l’État, les sentences capitales ont été commuées en des peines de vingt à cinquante ans de réclusion, avec effet rétroactif à la date de la condamnation. Aux termes de la législation zambienne, le meurtre, le vol aggravé et la trahison sont passibles de la peine de mort. La dernière recensée en Zambie remonte à 1997.

Tentatives infructueuses de rétablissement de la peine capitale

Pologne

Le 22 octobre, les députés polonais se sont prononcés à une faible majorité contre le rétablissement de la peine de mort, à la suite d’une série de meurtres qui avaient eu un grand retentissement dans l’opinion publique. Le président Alexandre Kwasniewski avait menacé d’opposer son veto si le Parlement votait en faveur du rétablissement de la peine de mort, sept ans après son abolition pour tous les crimes. Selon des informations parues dans la presse, la proposition de loi, qui émanait du parti d’opposition Loi et justice, a été rejetée par la Chambre basse du Parlement par 198 voix contre 194, avec 14 abstentions.

À la suite du vote, un porte-parole du ministre de la Justice a indiqué que le rétablissement de la peine capitale aurait « mis la Pologne dans une situation critique sur la scène internationale ».

Tentatives infructueuses d’extension du champ d’application de la peine de mort

Tonga

Le 27 septembre, le Parlement des Tonga, par 10 voix contre 7, a rejeté un projet de loi visant à rendre la détention de drogues illicites passible de la peine capitale. Un député a déclaré qu’il s’agissait d’un projet « absurde », et que le gouvernement l’avait soumis au Parlement alors qu’il ne disposait d’aucun argument solide pour l’étayer. Un autre a objecté qu’aucune liste des stupéfiants dont la détention serait passible de la peine capitale n’avait été établie.

Rétablissement de la peine capitale

Irak

Le 8 août, en dépit de la forte opposition de l’UE (dont des représentants s’étaient ouvertement prononcés contre le rétablissement de la peine de mort à l’occasion d’une visite en Europe du ministre irakien des Affaires étrangères), le gouvernement intérimaire irakien a officiellement rétabli la peine capitale pour certaines infractions telles que le meurtre, l’enlèvement, le viol et le trafic de stupéfiants. Bien que les autorités intérimaires irakiennes aient justifié cette décision par la nécessité de répondre à la détérioration de la situation en matière de sécurité, certaines sources ont indiqué que la mesure avait été prise avec réticence et que certains responsables irakiens s’y étaient opposés.

L’ancien régime irakien avait fréquemment recours à la peine de mort. À la suite de l’invasion de l’Irak, en mars 2003, par une coalition dirigée par les États-Unis, la peine capitale avait été suspendue par l’Autorité provisoire de la coalition en juin 2003.

Au mois de novembre 2004, Amnesty International a reçu des informations selon lesquelles 10 personnes avaient été condamnées à mort pour « activités criminelles ». À la fin de l’année, on ignorait si ces peines avaient été appliquées.

Sri Lanka

Le 20 novembre, le Bureau de la présidente du Sri Lanka a annoncé que « la peine de mort [serait] appliquée à compter de ce jour pour les crimes de viol, meurtre et trafic de stupéfiants ». Cette déclaration faisait suite à la mort d’un juge de la haute cour, Sarath Ambepitiya, et d’un policier chargé d’assurer sa sécurité, tous deux abattus le 19 novembre.

Un moratoire sur les exécutions est en vigueur au Sri Lanka depuis juin 1976, date de la dernière exécution dans ce pays. Depuis lors, les présidents qui se sont succédé ont automatiquement commué toutes les condamnations à mort. En mars 1999, dans un climat de hausse de la criminalité, le gouvernement annonçait que les condamnations à mort ne seraient plus commuées automatiquement lorsqu’elles seraient soumises au président. Toutefois, cette politique ayant soulevé une vague de protestations, elle n’avait pas été mise en œuvre. Amnesty International avait alors proposé que soit nommée une commission chargée d’étudier la hausse manifeste de la criminalité dans le pays et de faire des recommandations afin que des mesures efficaces soient prises, à l’exclusion de la peine de mort. En juin 2001, le ministre de la Justice de l’époque s’était déclaré intéressé par une étude de ce type. En mars 2003, Amnesty International a fait une proposition similaire au Premier ministre et au ministre de l’Intérieur, mais elle n’a pas reçu de réponse.

Condamnations à mort et exécutions

Au cours de l’année 2004, selon les informations recueillies par Amnesty International, au moins 3 797 prisonniers ont été exécutés dans 25 pays et pas moins de 7 395 personnes ont été condamnées à mort dans 64 pays. Cependant, les chiffres réels sont certainement plus élevés. Comme les années précédentes, l’immense majorité des exécutions signalées dans le monde se sont déroulées dans un très petit nombre de pays. En effet, en 2004, 97 p. cent des exécutions recensées ont eu lieu en Chine, en Iran, au Viêt-Nam et aux États-Unis. En s’appuyant sur les informations publiques disponibles, Amnesty International a évalué à au moins 3 400 le nombre de personnes à qui les autorités chinoises ont ôté la vie en 2004, mais ce chiffre est vraisemblablement très en deçà de la réalité. L’Iran a exécuté au moins 159 prisonniers et le Viêt-Nam pas moins de 64. Les États-Unis ont procédé à 59 exécutions, soit six de moins qu’en 2003. (Voir le document d’Amnesty International intitulé Condamnations à mort et exécutions en 2004, avril 2005, index AI : ACT 50/005/2005.

Reprise des exécutions

Afghanistan

Abdullah Shah, un chef militaire du district de Paghman, a été exécuté aux environs du 19 avril à Kaboul, la capitale de l’Afghanistan. Cet homme avait été reconnu coupable de meurtre, en octobre 2002, par un tribunal d’exception dont les procédures étaient loin de satisfaire aux normes internationales d’équité. Abdullah Shah n’a pas bénéficié des services d’un avocat lors de son procès, qui s’est tenu à huis clos, et le président du tribunal qui l’a jugé en première instance a été récusé pour avoir accepté des pots-de-vin. Il s’agissait de la première exécution judiciaire depuis la mise en place de l’administration intérimaire, fin 2001. Amnesty International a exhorté le président afghan, Hamid Karzaï, à instaurer un moratoire officiel sur les exécutions et à tenir ainsi les engagements pris vis-à-vis de l’organisation. En 2003, en effet, son cabinet avait assuré Amnesty International qu’il n’approuverait aucune exécution judiciaire tant que le pays n’aurait pas réformé son système de justice pénale. Après la publication, au mois d’avril, d’une déclaration publique d’Amnesty International condamnant l’exécution d’Abdullah Shah, le porte-parole du président a déclaré publiquement que les exécutions seraient suspendues.

Inde

La première exécution recensée depuis la fin des années 1990 a eu lieu au mois d’août 2004 et a été favorablement accueillie par une grande partie de la population. Dhananjoy Chatterjee a été pendu dans l’État du Bengale occidental ; il avait été condamné à mort treize ans auparavant pour le viol et le meurtre d’une adolescente. Le président indien et le gouverneur du Bengale occidental ont rejeté toutes les demandes de grâce qui leur ont été soumises. Amnesty International et d’autres défenseurs locaux des droits humains ont tenté, en vain, de faire valoir que Dhananjoy Chatterjee avait apparemment été condamné sur la base de présomptions et avait déjà passé de nombreuses années en prison. Dans d’autres affaires, des sentences capitales ont été commuées en peines de réclusion à perpétuité, en raison du temps que les condamnés avaient déjà passé en détention.

Indonésie

Trois personnes ont été exécutées pour avoir tenté d’introduire de l’héroïne dans le pays. Ayodhya Prasad Chaubey, de nationalité indienne, a été exécuté le 5 août ; Saelow Prasert et Namsong Sirilak, deux ressortissants thaïlandais, ont été exécutés le 1er octobre. C’était la première fois depuis plus de trois ans que des exécutions avaient lieu en Indonésie. Huit autres personnes, condamnées à mort pour des infractions à la législation sur les stupéfiants, ont vu leur demande de grâce présidentielle rejetée. À la fin de l’année 2004, on craignait que leur exécution, ainsi que celle de deux autres personnes condamnées à mort pour meurtre, ne soit imminente.

États-Unis - Maryland

Steven Oken a été exécuté le 17 juin pour un meurtre commis en 1987. La dernière exécution dans le Maryland remontait à 1998. Steven Oken est le premier condamné exécuté dans cet État depuis le moratoire instauré en mai 2002 par le gouverneur de l’époque, Parris Glendening. Celui-ci avait pris la décision de suspendre les exécutions dans l’attente des conclusions d’une étude - qu’il avait commandée - sur l’équité du système d’application de la peine capitale dans le Maryland. Lorsqu’il a pris ses fonctions en janvier 2003, le nouveau gouverneur, Robert Ehrlich, a levé le moratoire, indiquant qu’il réexaminerait les condamnations à mort au cas par cas. Robert Ehrlich a refusé d’accorder sa grâce à Steven Oken.

Condamnés à mort innocentés

États-Unis

Au cours de l’année 2004, six noms se sont ajoutés à la liste des prisonniers américains condamnés à mort puis libérés après avoir été déclarés innocents, portant à 118 le nombre d’anciens condamnés ainsi innocentés depuis 1973.

* Alan Gell a été condamné à mort en Caroline du Nord en 1998. Il a passé quatre années dans le couloir de la mort avant qu’un juge n’ordonne la tenue d’un nouveau procès, au motif que le ministère public avait omis de produire des éléments de preuve à décharge. En février 2004, au terme de ce nouveau procès, Alan Gell a été déclaré non coupable de tous les chefs d’accusation retenus contre lui et acquitté.

* Gordon Steidl a été condamné à la peine capitale dans l’Illinois en 1987. Sa condamnation a été annulée en 1999, au motif qu’il n’avait pas bénéficié d’une assistance juridique appropriée lors de son procès. Il a alors été condamné à la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. En 2003, un juge fédéral a infirmé ce jugement, déclarant que si tous les éléments de preuve disponibles avaient été présentés lors du premier procès, Gordon Steidl aurait probablement été acquitté. Après avoir mené une nouvelle enquête, les autorités ont décidé de ne pas organiser de nouveau procès. Gordon Steidl a été libéré en mai 2004.

* Laurence Adams a été condamné à mort dans le Massachusetts en 1974. La cour suprême de cet État a commué sa sentence en une peine de réclusion à perpétuité après avoir déclaré inconstitutionnelle la législation relative à la peine de mort dans le Massachusetts. En mai 2004, sa condamnation a été annulée par un juge fédéral au motif que la police avait dissimulé des éléments de preuve. Les poursuites ont été abandonnées le mois suivant et Laurence Adams a été remis en liberté.

* Dan Bright a été condamné à mort en Louisiane en 1996. En 2000, la cour suprême de cet État a statué que les preuves retenues contre lui n’étaient pas suffisantes pour étayer son inculpation pour meurtre avec circonstances aggravantes et l’a disqualifiée en meurtre sans circonstances aggravantes. Cette juridiction a alors commué sa condamnation à mort en une peine de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. En mai 2004, elle a annulé la condamnation de Dan Bright, au motif que le ministère public avait omis de divulguer des informations qui remettaient en cause la crédibilité de son témoin clé. L’action publique a alors été déclarée éteinte et Dan Bright a été remis en liberté.

* Ryan Matthews a été condamné à la peine capitale en Louisiane en 1999 pour un crime qu’il était accusé d’avoir commis quand il avait dix-sept ans. Les preuves retenues contre lui étaient douteuses et il a bénéficié d’une piètre assistance juridique. En avril 2004, un juge a ordonné l’ouverture d’un nouveau procès, des tests ADN ayant permis de l’innocenter. En août, le ministère public a abandonné les poursuites à son encontre.

* Ernest Ray Willis a été condamné à mort au Texas en 1987, après avoir été déclaré coupable de la mort de deux personnes qui avaient péri dans un incendie. Un juge fédéral a annulé la déclaration de culpabilité en 2004, au motif que le ministère public avait fait disparaître des éléments de preuve favorables à cet homme et que celui-ci n’avait pas bénéficié d’une assistance juridique satisfaisante. Le procureur du comté a engagé un spécialiste en incendies criminels afin de réexaminer les éléments à l’origine de sa condamnation. Cet expert a estimé que rien ne permettait de conclure à un incendie volontaire. Toutes les poursuites contre Ernest Ray Willis ont alors été abandonnées et il a été libéré en octobre.

Condamnations fondées sur des preuves douteuses

États-Unis - Texas

Sur les 59 exécutions recensées aux États-Unis en 2004, 23 ont eu lieu au Texas. Huit personnes poursuivies dans le Comté de Harris ont été exécutées au cours de l’année. Pourtant, de sérieux doutes subsistaient quant à la fiabilité des preuves médicolégales traitées par le laboratoire de police scientifique des services de police de Houston, où de graves dysfonctionnements avaient été mis au jour en 2003. En octobre 2004, un juge de la cour d’appel pénale du Texas a déclaré qu’il fallait « suspendre l’exécution de toute personne condamnée sur la base d’éléments de preuve analysés par le laboratoire de police scientifique des services de police de Houston, le temps que soit vérifiée la fiabilité de ces éléments ». Ce juge est le seul à avoir voté en faveur de la demande de sursis de Dominique Green, un condamné à mort qui avait mis en avant les incertitudes qui planaient sur la fiabilité de l’expertise balistique menée par le laboratoire dans le cadre de son dossier. Le condamné avait également cherché à faire valoir le fait qu’on avait récemment trouvé 280 boîtes contenant des éléments de preuve mal répertoriés, découverte susceptible d’avoir un impact sur des milliers d’affaires criminelles. Dominique Green a été exécuté le 26 octobre 2004. (Consulter également le document publié par Amnesty International sous le titre États-Unis d’Amérique. Erreur fatale : Nanon Williams, mineur délinquant, risque d’être exécuté sur la base de preuves douteuses, janvier 2004, index AI : AMR 51/002/2004).

Initiatives visant à améliorer les révisions judiciaires

Chine

Huang Songyou, vice-président de la Cour populaire suprême de Chine, a déclaré en octobre que cette juridiction serait bientôt réinvestie de son pouvoir de statuer sur toutes les condamnations à mort prononcées dans le pays. S’exprimant à l’occasion de la Conférence annuelle de la China Law Society, il a affirmé que cette réforme avait été inscrite au programme législatif prévu jusqu’au mois de mars 2008 et entériné lors de la 10e Assemblée populaire nationale. Aux termes de la Loi relative à la procédure pénale, la Cour populaire suprême doit réexaminer toutes les affaires dans lesquelles la peine capitale a été prononcée. Toutefois, depuis 1980, la Cour a progressivement délégué cette prérogative aux juridictions inférieures, qui examinent et approuvent actuellement environ 90 p. cent des condamnations à mort. Si les amendements proposés sont adoptés, la Cour suprême populaire devra obligatoirement procéder à une révision de toutes les condamnations à mort. De l’avis d’un intellectuel chinois de premier plan, cette réforme pourrait réduire d’un tiers le nombre des exécutions et permettre une plus grande cohérence dans le prononcé des sentences capitales.

Application de la peine de mort à des mineurs délinquants

Plusieurs traités internationaux, notamment la Convention relative aux droits de l’enfant et le PIDCP, interdisent d’appliquer la peine de mort aux mineurs délinquants, c’est-à-dire aux personnes qui étaient âgées de moins de dix-huit ans au moment des faits qui leur sont reprochés. En janvier, Amnesty International a lancé une campagne visant à mettre fin à l’application de la peine capitale aux mineurs délinquants partout dans le monde.

Chine

Gao Pan, un fermier du village de Liguo, dans le canton de Gaoyang (province du Hebei), a été exécuté le 8 mars pour un crime commis le 9 août 2001. Il avait alors moins de dix-huit ans, mais malgré les efforts déployés par sa famille et son avocat, les tribunaux n’ont jamais voulu reconnaître qu’il était mineur au moment des faits. Plusieurs juristes et légistes chinois de premier plan ont critiqué la façon dont cette affaire avait été traitée. (Pour en savoir plus sur l’affaire Gao Pan, veuillez vous reporter au document d’Amnesty International intitulé Halte à l’exécution de mineurs délinquants !, septembre 2004, index AI : ACT 50/015/2004, pp. 10-11.)

Iran

Trois personnes condamnées pour des faits commis alors qu’elles avaient moins de dix-huit ans ont été exécutées en Iran en 2004, et plusieurs autres mineurs ont été condamnés à mort.

Mohamed Zadeh et un jeune homme connu sous le nom de Salman auraient été exécutés respectivement le 25 janvier et le 12 mai. Ils avaient tous deux dix-sept ans au moment des faits qui leur étaient reprochés. Le 15 août, Atefeh Rajabi, une adolescente de seize ans, aurait été pendue en public à Neka (ville de la province de Mazandaran, située dans le nord du pays), après avoir été déclarée coupable d’« actes incompatibles avec la chasteté ». Son coaccusé, un homme dont on ignore l’identité, aurait été condamné à recevoir 100 coups de fouet. Il aurait été libéré après avoir subi sa peine.

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